Depuis la côte ouest de Taïwan, le versant oriental apparut longtemps comme un monde lointain : la chaîne des montagnes centrales divise Taïwan du nord au sud sur 340 km. Plus d’une centaine de pics s’élèvent au-dessus de 3000 m (mais aucun d’entre eux n’atteint la hauteur des 4000), pics très souvent couverts de nuages et de brume. Parallèlement à cette chaîne de hautes montagnes, et face au Pacifique, se dresse, bien plus modeste, une chaîne de montagnes côtières, laissant très peu de terres entre la montagne et la mer. Entre ces deux chaînes de montagnes, s’étend une vallée – une longue crevasse plutôt – qui s’allonge sur 180 km, mais dont la largeur est toujours comprise entre 2 et 7 km. À ses extrémités nord et sud, l’étroite bande côtière de l’est de Taïwan s’ouvre sur deux vastes plaines.


En 2008, j’ai passé trois à quatre mois dans l’un des villages aborigènes de Taïwan situés entre les montagnes centrales et la chaîne des montagnes côtières.  Avec quelques amis, nous avons réalisé un modeste documentaire autour de la mémoire du village et de ses généalogies. Avant mon installation dans une maison vide, mes hôtes avaient déposé un verre d’alcool devant la photographie des grands-oncles et grands-tantes qui y avaient résidé, expliquant en même temps qui j’étais et ce que je venais faire là. Je vis de tels actes, simples et furtifs se répéter presque journellement : dans ce village catholique, la communication avec les ancêtres allait de soi. Il s’agissait d’abord et avant tout de leur dire ce qu’on entreprenait dans les lieux qu’ils avaient habités, comme on en tenait informé les membres les plus âgés du village, avec simplicité, déférence et gentillesse.


Extrait du documentaire "On the Fifth Day the Sea Tide Rose" :
https://youtu.be/jPLkdCGUi98

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